Il existe une croyance selon laquelle la recherche universitaire est une recherche objective, soumise à la neutralité du chercheur, laquelle assure la rigueur des processus de recherche et garantit la qualité des travaux. La sphère émotionnelle du chercheur, qui peut présider au choix conscient ou inconscient de ses objets d’étude, tout comme aux diverses méthodes qu’il emploiera, est rarement évoquée, encore moins étudiée. Or, depuis au moins les travaux de Donna Haraway, il existe une pensée selon laquelle l’objectivité et la rigueur scientifique du chercheur sont insuffisantes, voire contre productives. Haraway affirme que pour échapper à l’asphyxie académique, il faut au contraire engager le « sujet-chercheur ». De là l’autothéorie qui analyse la multiplicité des liens entre l’intime et la théorie. Nous nous proposons dans ce numéro 34 d'Inter-lignes de nous focaliser sur les émotions, les sensations dans la pratique de la recherche, pour dire leur pouvoir heuristique ou au contraire mystifiant.